Discours de Michael Jackson à l'Université d'Oxford - 6 mars 2001
" Merci, merci chers amis, du fond de mon coeur, pour cet affectueux et si vif accueil, et merci Monsieur le Président de votre aimable invitation que je suis si honoré d'accepter. Je veux aussi exprimer un remerciement spécial à Shmuley qui pendant 11 ans a servi comme rabbin ici à Oxford. Toi et moi avons travaillé si durement pour bâtir Heal The Kids, tout comme pour écrire notre livre sur les qualités de l'innocence et dans tous nos efforts, tu as été d'un grand soutien et un tendre ami. J'aimerais aussi remercier Toba Friedman, notre directrice des opérations à Heal The Kids, qui revient ce soir à l' Université où elle a servi comme commissaire universitaire (Marshall scholar) ainsi que Marilyn Piels, un autre membre important de notre équipe à Heal The Kids.
Je suis ému de faire un discours dans un endroit qui a déjà reçu d'éminents personnages comme Mère Teresa, Albert Einstein, Ronald Reagan , Robert Kennedy et Malcolm X. J'ai même entendu dire que Kermit la grenouille était passé ici, je me suis toujours senti proche du message de Kermit... qu'il n'est pas facile d'être vert. Tout comme moi, je suis sûr qu'il n'a pas trouvé ça si facile d'être ici.
Comme je jetais un oeil autour d'Oxford aujourd'hui, je n'ai pas pu m'empêcher d'être conscient de la majesté et la splendeur de cette grande institution, sans mentionner le génie des plus grands esprits qui ont erré dans ces rues pendant des siècles. Les murs d'Oxford n'ont pas seulement abrité les plus grands philosophes et scientifiques, mais aussi quelques uns des créateurs les plus aimés de la littérature enfantine, de JRR Tolkien à CS Lewis. Aujourd'hui, j'ai pu me rendre en boitillant dans le réfectoire de "Christ Church" voir le "Alice Aux Pays Des Merveilles" de Lewis Caroll immortalisé dans des vitraux. Même qu'un de mes compatriotes, le bien-aimé Dr Seuss, a orné ces salles pour ensuite laisser sa marque dans l'imagination de millions d'enfants à travers le monde.
Peut-être devrais-je commencer en faisant une liste de mes qualifications pour parler devant vous ce soir. Mes amis, je ne prétends pas avoir l'expertise académique des autres orateurs qui ont pris la parole dans cette salle, de même qu'eux ne pourraient pas prétendre être des experts du Moonwalk...et vous savez, Einstein en particulier était vraiment nul à ça !... Mais je prétends avoir pu expérimenter plus d'endroits et de cultures que la plupart des gens n'en verront jamais. La connaissance humaine ne consiste pas seulement en une bibliothèque de parchemins et d'encre - elle est aussi formée des volumes de la connaissance écrits sur le coeur de l'homme, ciselés sur l'âme humaine et gravés sur l'esprit de l'homme. Mes amis, j'en ai tellement vu dans cette relativement courte vie qu'est la mienne que j'ai peine à croire n'avoir que 42 ans. Je dis souvent à Shmuley qu'en comptant l'âge de mon âme je suis certain d'avoir au moins 80 ans, même que ce soir je marche comme un homme de 80 ans !...
Écoutez bien mon message car ce que j'ai à vous dire ce soir peut apporter guérison à l'humanité et guérison à notre planète. Par la grâce de Dieu, j'ai eu la chance d'avoir accompli plusieurs de mes aspirations artistiques et professionnelles tôt dans ma vie. Mais ça, mes amis, ce ne sont que des exploits et les exploits pris seuls ne sont pas synonymes de qui je suis. En effet, le joyeux bambin de 5 ans qui chantait à pleins poumons Rockin' Robin et Ben devant des foules en adoration n'était pas le reflet du garçon derrière le sourire.
Ce soir, je me présente à vous moins comme une icône de la pop mais plus comme une icône d'une génération... une génération qui ne sait plus ce que signifie d'être un enfant. Nous sommes tous les produits de notre enfance. Je suis le produit d'un manque enfance c'est-à-dire de l'absence de cette précieuse et merveilleuse période quand on gambade joyeusement en ne se préoccupant pas du monde, se délectant dans l'amour des parents et de la famille et où notre plus grand souci est d'étudier pour ce grand test d'épellation du lundi matin. Certains d'entre vous qui sont familiers avec les Jackson Five savent que j'ai commencé à chanter dès l'âge tendre de 5 ans et que depuis ce temps je n'ai jamais arrêté de danser et chanter. Mais même si chanter et faire de la musique restent assurément quelques unes de mes plus grandes joies, quand j'étais petit ce que je voulais plus que toute autre chose était d'être un petit garçon normal. Je voulais construire des cabanes dans les arbres, faire des batailles de ballons d'eau et jouer à cache-cache avec mes amis. Mais le destin en a décidé autrement et tout ce que je pouvais faire était d'envier les rires et les jeux qui semblaient être tout autour de moi. Il n'y avait pas de répit dans ma vie professionnelle. Mais les dimanches je pouvais aller au Pioneering, c'est le terme utilisé pour le travail que les Témoins de Jéhovah effectuent. C'était à ces moments-là que je pouvais voir l'enfance magique des autres. Puisque j'étais déjà une célébrité, je devais mettre des déguisements de gros, une perruque, une barbe et des lunettes. On pouvait passer la journée dans les banlieues du sud de la Californie à faire du porte-à-porte ou faire la tournée des centres d'achat et distribuer notre magazine Watchtower. J'aimais entrer dans toutes ces maisons semblables de la banlieue et entrevoir les tapis à longs poils et les fauteuils La-Z-Boy avec des enfants jouant au Monopoly sous la surveillance des grands-mamans, toutes ces scènes fabuleuses de la vie de tous les jours. Plusieurs, je le sais, pourraient soutenir que ces choses ne semblaient pas très passionnantes. Mais pour moi, elles étaient envoûtantes.
Avant, j'avais l'habitude de penser que j'étais seul avec ce sentiment de ne pas avoir eu d'enfance. En fait, je croyais qu'il n'y avait qu'une petite poignée de gens avec qui je pouvais parler de ces sentiments. Mais récemment j'ai rencontré Shirley Temple Black, la célèbre enfant-star des années 30-40, et nous n'avons rien pu nous dire au début. Nous avons simplement pleuré ensemble. Elle pouvait enfin partager cette douleur avec moi que seulement d'autres, comme mes amis intimes Élizabeth Taylor et Macauly Culkin, connaissent. Je ne vous dis pas ça pour gagner votre sympathie mais pour vous faire comprendre mon premier point important - que ce ne sont pas seulement les enfants-stars d'Hollywood qui ont souffert d'une enfance inexistante.
Aujourd'hui, c'est une calamité universelle, une catastrophe mondiale. L'enfance est devenue la grande victime des temps modernes. Tout autour de nous naissent des tas d'enfants qui n'auront pas accès au bonheur, à qu'aucun droit ne sera accordé et à qui aucune liberté ne sera permise, ils ne savent même pas ce que c'est que d'être un enfant. Aujourd'hui, les enfants sont constamment poussés à grandir plus vite comme si cette période de l'enfance était un lourd fardeau à endurer et à quitter le plus rapidement possible. Je suis certainement l'un des plus grands experts au monde en la matière.
Nous sommes une génération témoin de l'abolition de l'engagement parent-enfant. Les psychologues publient des collections de livres qui parlent des effets destructeurs de priver ses enfants de l'amour inconditionnel si nécessaire au bon développement de leur esprit et personnalité. En raison de toute cette négligence, un trop grand nombre de nos enfants s'élèvent par eux-mêmes. Ils vivent éloignés de leurs parents, grands-parents et autres membres de la famille. Autour de nous les liens indestructibles qui unissaient autrefois les générations ensemble, s'effilochent.
Cette violation a fait naître une nouvelle génération, que nous appellerons 'Génération O' et qui reprend maintenant le flambeau de la Génération X. Les O représentent une génération qui de l'extérieur possèdent tout : santé, succès, beaux vêtements, belles voitures mais qui de l'intérieur ne ressentent qu'un vide douloureux. Cet espace dans nos poitrines, cette sécheresse au centre de nous, ce vide dans nos coeurs, c'est l'endroit où le coeur battait autrefois, l'endroit jadis occupé par l'amour. Et ce ne sont pas seulement les enfants qui souffrent, mais les parents aussi.
Plus nous cultivons des petits adultes dans le corps des enfants, plus nous nous éloignons de nos propres qualités enfantines et pourtant, il y a tellement de choses chez les enfants qui valent la peine d'être maintenues dans la vie adulte. L'amour, mesdames et messieurs, est l'héritage le plus précieux de la famille, son legs le plus riche et son patrimoine d'or. Et c'est un trésor qui se transmet d'une génération à l'autre.
Les époques précédentes n'avaient pas la richesse dont nous disposons, leurs maisons manquaient d'électricité et leurs nombreuses progénitures étaient entassés dans des petites maisons sans chauffage central. Mais ces maisons n'étaient ni sombres ni froides. Elles étaient éclairées par la lumière brillante de l'amour et elles étaient confortablement chauffées à même la chaleur du coeur humain. Les parents, peu distraits par la soif du luxe et du prestige, accordaient la priorité à leurs enfants dans leurs vies. Comme vous le savez tous, nos deux pays se sont séparés sur ce qu'avait dit Thomas Jefferson en référence à "certains droits inaliénables"...
Et même si nous, les Américains et les Britanniques, pouvions contester la justice de ses réclamations, ce qui ne peut jamais être contestable est que les enfants ont eux aussi "certains droits inaliénables" et l'érosion graduelle de ces droits a abouti à ce que des masses d'enfants dans le monde soient privées des joies et de la sécurité de l'enfance. J'aimerais donc proposer ce soir que nous installions dans chaque foyer une Déclaration Universelle des Droits des Enfants dont les principes sont :
- Le droit d'être aimé sans devoir le gagner - Le droit d'être protégé sans devoir le mériter - Le droit d'être estimé même si vous ne possédez rien - Le droit d'être écouté sans devoir être intéressant - Le droit d'avoir une histoire avant d'aller dormir sans devoir concurrencer le journal télévisé du soir (ou l'émission EastEnders) - Le droit à une éducation sans devoir esquiver des balles à l'école - Le droit d'être considéré comme adorable (même si vous avez un visage que seule une mère peut aimer)
Mes amis, la base de toute la connaissance humaine, le commencement de la conscience humaine, est que chacun de nous doit être un objet d'amour. Avant de savoir si vous êtes roux ou brun, avant de savoir si vous êtes noir ou blanc, avant de savoir à quelle religion vous appartenez, vous devez savoir que vous êtes aimés. Il y a douze ans quand j'étais sur le point de commencer mon Bad Tour, un petit garçon est venu avec ses parents me visiter chez moi en Californie. Il se mourait d'un cancer et me disait combien il m'aimait, moi et ma musique.
Ses parents m'ont dit qu'il ne vivrait pas, que d'un jour à l'autre il pourrait partir, je lui ai dit : <> Ses yeux se sont illuminés et il a dit : <> J'ai répondu : <> J'essayais de l'encourager. J'ai dit : <> et je lui ai donné un de mes gants en pierres de Rhin - et d'habitude je ne donne jamais mes gants en pierres de Rhin. Il était au paradis. Mais peut-être était-il trop près du paradis car lorsque je suis arrivé dans sa ville, il était déjà mort. Ils l'avaient enterré avec le gant et la veste. Il n'avait que 10 ans.
Dieu sait, j'en suis certain, qu'il a essayé de toutes ses forces de rester en vie. Mais au moins quand il est mort, il savait qu'il était aimé, pas seulement de ses parents, mais par moi aussi, un quasi étranger, je l'aimais également. Avec tout cet amour, il savait qu'il n'était pas venu au monde seul et qu'il n'en est certainement pas reparti seul. ... Si vous entrez dans ce monde en sachant que vous êtes aimés et que vous en repartez en sachant la même chose, alors tout ce qui arrive entre les deux peut se concilier.
Un professeur peut essayer de vous dégrader mais jamais vous ne vous sentirez dégradé, un patron peut essayer de vous écraser mais jamais vous ne serez écrasés, une entreprise peut essayer de vous vaincre mais toujours vous triompherez. Comment se fait-il qu'aucun d'eux ne peut vraiment l'emporter en vous rabaissant ? Parce que vous vous savez être un objet digne d'amour. Le reste n'est que superflu.
Mais si vous n'avez pas cette mémoire d'être aimé, vous êtes alors condamnés à chercher dans le monde quelque chose pour vous combler. Peu importe l'argent que vous gagnerez ou la célébrité que vous deviendrez, vous vous sentirez toujours vide. Ce que vous recherchez avant tout c'est l'amour sans condition, l'acceptation sans aucune réserve. Mais c'était la chose qui vous a été refusée à la naissance.
Les amis, laissez-moi vous brosser un tableau. Voici une journée typique en Amérique : six jeunes de moins de 20 ans commettront un suicide, douze enfants de moins de 20 ans succomberont sous les balles d'armes à feu -- rappelez-vous que c'est par jour, pas par année. Trois cents quatre-vingt-dix-neuf enfants seront arrêtés pour avoir pris de la drogue, 1,352 bébés naîtront de mères adolescentes. Ça se passe dans un des pays les plus riches et les plus développés de l'histoire du monde. Oui, dans mon pays il y a une épidémie de violence qui ne met en parallèle aucune autre nation industrialisée. Ce sont des façons pour les jeunes en Amérique d'exprimer leur mal de vivre et leur colère.
Mais ne croyez pas que ces mêmes douleurs et angoisses sont absentes chez leurs homologues du Royaume-Uni. Des études dans ce pays prouvent qu'à chaque heure, trois adolescents s'infligent violence sur eux-mêmes : souvent en coupant ou en brûlant leur corps ou en prenant une surdose. C'est la façon qu'ils ont choisi pour confronter la douleur de la négligence et de l'agonie émotionnelle. En Grande-Bretagne, près de 20% des familles s'assoiront et dîneront ensemble qu'une fois par an seulement. Une fois par année ! Et que dire de la tradition sacrée de lire une histoire à votre enfant avant de dormir ?
Une recherche dans les années 80 a démontré que les enfants à qui on a lu une histoire avant de dormir ont une plus grande facilité à lire et à écrire et surpassent sensiblement leurs pairs à l'école. Mais moins de 33% des enfants Britanniques âgés de 2 à 8 ans se font régulièrement lire une histoire avant d'aller dormir. Vous n'y pensez pas trop jusqu'à ce que vous réalisiez que 75% des parents de ces mêmes enfants ont eu cette histoire quand ils avaient leur âge.
En fait, on n'a pas besoin de chercher l'origine de toute cette souffrance, colère et comportement violent. Il est évident que ces enfants tonnent contre la négligence, tremblent contre l'indifférence et qu'ils protestent pour être remarqués. Divers organismes américains pour la protection de l'enfance soutiennent que des millions d'enfants par année sont victimes de mauvais traitements sous forme de négligence. Oui, de négligence. Dans des maisons bien nanties, privilégiées, branchées au maximum à tous les derniers gadgets électroniques. Des maisons où les parents rentrent chez eux sans vraiment être là parce que leurs pensées sont toujours au bureau. Et leurs enfants ? Bien, leurs enfants se contentent des quelques miettes d'affection qu'ils obtiennent. Et vous n'avez pas grand chose avec la télé qui joue sans fin, les jeux d'ordinateur et de vidéos.
Ces chiffres durs et froids qui me brusquent l'âme et l'esprit, devraient vous indiquer pourquoi j'ai consacré tellement de mon temps et de mes énergies pour faire de notre nouvelle 'Heal The Kids Initiative', un succès colossal.
Notre but est simple : recréer le lien parent/enfant, renouveler sa promesse et éclairer le chemin pour tous les enfants qui seront destinés un jour à marcher sur cette terre.
Mais étant donné que c'est ma première conférence et que vous m'avez si chaudement accueilli dans vos coeurs, je sens que j'aimerais vous en dire un peu plus. Chacun de nous avons notre propre histoire et dans ce sens, les statistiques peuvent devenir personnelles. Ils disent qu'être parent c'est comme danser. Vous faites un pas, votre enfant en fait un autre. J'ai découvert qu'obliger des parents à se 're-consacrer' à leurs enfants n'est qu'une partie de l'histoire. L'autre partie prépare les enfants à 'ré-accepter' leurs parents.
Quand j'étais très jeune, je me rappelle que nous avions ce chien fou appelé Black Girl, un mélange de loup et retriever. Non seulement n'était-elle pas un chien de garde, en plus cette chienne était si effrayée et nerveuse que c'était un vrai miracle qu'elle ne se soit pas évanouie à chaque fois qu'un camion passait ou qu'un orage balayait l'Indiana. Ma soeur Janet et moi donnions beaucoup d'amour à ce chien mais jamais nous n'avons pu retrouver le sentiment de confiance qui lui avait été volé par son ancien propriétaire. On a su qu'il avait l'habitude de la battre mais sans savoir avec quoi. Mais peu importe ce que c'était, ce fut suffisant pour lui faire perdre à jamais cette confiance.
Beaucoup d'enfants aujourd'hui sont des petits chiots blessés qui se sont sevrés eux-mêmes du besoin d'amour. Ils ne s'inquiéteront pas pour leurs parents. Habitués à se débrouiller par eux-mêmes, ils chérissent leur indépendance. Ils ont poursuivi leur chemin en laissant leurs parents derrière. Par contre, il existe des situations plus pénibles où des enfants cultivent de l'animosité et du ressentiment envers leurs parents de sorte que quoi qu'ils fassent, les parents se verront refusés vigoureusement tout rapprochement. Ce soir, je ne veux pas qu'un de nous commette cette erreur. C'est pourquoi j'invite tous les enfants du monde, en commençant par nous tous ici ce soir, à pardonner à nos parents si nous nous sommes sentis négligés. Pardonnez-leur et enseignez-leur comment aimer de nouveau.
Vous ne serez probablement pas étonnés d'entendre que je n'ai pas eu une enfance idyllique. La tension qui existe dans ma relation avec mon père est bien documentée. Mon père est un homme sévère et il nous a poussé durement mes frères et moi dès notre plus jeune âge à être les meilleurs chanteurs que nous pouvions devenir. Il a eu beaucoup de difficulté à me montrer de l'affection. Il ne m'a jamais vraiment dit qu'il m'aimait. Il ne m'a jamais complimenté non plus.
Si je faisais un grand spectacle, il me disait que c'était un bon show. Et si j'en faisais un correct, il ne disait rien. Il semblait surtout déterminé à faire de nous un succès commercial. Et à ça, il était très habile. Mon père était un manager de génie et mes frères et moi devons notre succès professionnel en grande majorité à la manière énergique qu'il nous a poussé. Il m'a dirigé tel un homme de scène et sous sa direction je ne pouvais pas manquer un pas. Mais ce que je voulais vraiment c'était un Papa. Je voulais un père capable de me montrer de l'amour. Et mon père ne l'a jamais fait. Il ne m'a jamais dit je t'aime en me regardant droit dans les yeux, il n'a jamais joué avec moi. Il ne m'a jamais porté sur son dos, jamais lancé une oreiller ou un ballon d'eau. Mais je me rappelle une fois quand j'avais 4 ans, il y avait une petite fête foraine et il m'avait pris dans ses bras pour me mettre sur un poney. C'était un petit geste de rien du tout, probablement quelque chose qu'il a oublié cinq minutes plus tard. Mais à cause de ce moment, il occupe une place spéciale dans mon coeur. Parce que les enfants sont ainsi faits, les petites choses sont tellement importantes pour eux que pour moi, ce seul moment signifiait tout. Je ne l'ai vécu qu'une seule fois mais cela m'a permis de me sentir tellement bien avec lui et le monde.
Mais maintenant je suis un père moi-même et un jour je me suis mis à penser à mes propres enfants, Prince et Paris, et à comment je voulais qu'ils pensent à moi en grandissant. Être sûr, je voudrais qu'ils se rappellent comment j'ai toujours voulu qu'ils soient près de moi partout où je suis allé, comment j'ai toujours essayé qu'ils soient la priorité avant toute autre chose.
Mais il y a également des défis dans leurs vies. Parce que mes enfants sont traqués par les paparazzis, ils ne peuvent pas toujours aller au parc ou au cinéma avec moi. Qu'arrivera-t-il si en grandissant ils m'en veulent, comment mes choix auront-ils eu un impact sur leur jeunesse ? Pourquoi ne pouvions-nous pas avoir une enfance ordinaire comme celle des autres, pourraient-ils demander ?
Dans ce moment-là, je prie pour que mes enfants me donnent le bénéfice du doute. Qu'ils se diront : "Notre papa a fait du mieux qu'il pouvait étant donné les circonstances exceptionnelles auxquelles il a dues faire face." "Il n'était peut-être pas parfait mais il était un homme chaleureux et bon qui a essayé de nous donner tout l'amour du monde." J'espère qu'ils se concentreront toujours sur les choses positives, sur les sacrifices que j'ai volontairement faits pour eux et qu'ils ne critiqueront pas les choses auxquelles ils ont dues renoncer ou les erreurs que j'ai pu faire et que je continuerai certainement de faire en les élevant. Nous avons tous été l'enfant de quelqu'un et nous savons qu'en dépit du meilleur des plans et des efforts, des erreurs se produiront toujours. C'est simplement humain.
Quand je pense à la façon dont j'espère que mes enfants ne me jugeront pas cruellement et qu'ils pardonneront mes imperfections, je suis forcé de penser à mon père et, malgré mes récents démentis, je me dois d'admettre qu'il a dû m'aimer. Il m'a aimé et je le sais. Des petites choses le prouvaient.
Quand j'étais petit j'adorais vraiment les sucreries, comme nous tous. Ce que j'aimais le plus était les beignets glacés et mon père le savait. À toutes les 2 ou 3 semaines je descendais le matin et là sur le comptoir de la cuisine il y avait un sac de beignets glacés - sans aucune note, ni explication - juste des beignets. Comme si c'était le Père Noël. Parfois je pensais à rester éveillé tard la nuit pour pouvoir le voir les déposer là, mais comme avec le Père Noël, je n'ai pas voulu briser la magie au cas où il ne le ferait plus jamais. Mon père a dû les laisser secrètement la nuit pour que personne ne le surprenne. L'émotion humaine l'effrayait, il ne la connaissait pas ou n'a jamais su comment s'en arranger mais il connaissait les beignets !
Quand je laisse s'ouvrir toute grande la porte, il y a d'autres souvenirs qui s'y précipitent, des souvenirs de d'autres petits gestes qui, mêmes imparfaits, ont prouvé qu'il faisait ce qu'il pouvait. Ce soir, plutôt que de focaliser sur ce que mon père n'a pas fait, je veux me concentrer sur toutes les choses qu'il a réalisées et sur ses propres défis personnels.
Je veux arrêter de le juger. J'ai commencé à réfléchir sur le fait que mon père a grandi dans le Sud, dans une famille pauvre. Il est venu au monde pendant la Grande Dépression et son père, qui a lutté pour nourrir ses enfants, a montré très peu d'affection envers sa famille et il a élevé mon père et ses autres enfants avec une poigne de fer. Qui pourrait imaginer ce que c'était que de grandir en pauvre homme noir du Sud, privé d'espoir et de dignité, luttant pour devenir un homme dans un monde qui voyait mon père comme un subalterne.
J'ai été le premier artiste noir à passer sur MTV et je me rappelle comment c'était toute une affaire à l'époque. Et c'était dans les années 80 !
Mon père a déménagé dans l'Indiana et a eu sa grande famille, travaillant de longues heures dans une aciérie, un travail qui empoisonne les poumons et humilie l'esprit, n'importe quoi pour sa famille. Est-ce si étonnant qu'il ait trouvé difficile de montrer ses sentiments ? Est-ce si mystérieux d'avoir fermé son coeur, d'avoir dressé des barrières ? Mais surtout, est-ce si étonnant d'avoir poussé durement ses fils afin qu'ils réussissent comme chanteurs et qu'ils soient épargnés de ce qu'il connaissait être une vie indigne et pauvre ?
J'ai commencé à comprendre que même la dureté de mon père était une sorte d'amour, un amour imparfait pour sûr, mais un amour néanmoins. Il m'a poussé parce qu'il m'aimait. Parce qu'il voulait qu'aucun homme ne regarde ses enfants de haut. Et maintenant avec le temps, plutôt que de l'amertume, je me sens béni. Au lieu de la colère, j'ai trouvé l'absolution. Au lieu de la vengeance, j'ai trouvé la réconciliation. Ma fureur du début a lentement fait place au pardon.
Presque une décennie plus tôt, j'ai fondé une oeuvre de charité appelée Heal The World. Le titre était quelque chose que je sentais en moi. Je savais, comme Shmuley me l'a précisé plus tard, que ces deux mots forment la pierre angulaire d'une prophétie de l'Ancien Testament. Est-ce que je crois vraiment que nous pouvons guérir ce monde, ce monde plein de guerre et de génocide encore aujourd'hui ? Et est-ce que je pense vraiment que nous pouvons guérir nos enfants, ces mêmes enfants capables d'entrer à l'école avec pistolets et haine et abattre leurs camarades de classe comme ils ont fait à Columbine ?
Ou ces enfants capables de battre à mort un bambin sans défense comme l'histoire tragique de Jamie Bulger ? Bien sûr que j'y crois, sinon je ne serais pas ici ce soir. Mais tout commence par le pardon car pour guérir le monde, nous devons d'abord nous guérir.
Et pour guérir les enfants, nous devons d'abord guérir l'enfant à l'intérieur de chacun de nous. En tant qu'adulte et parent, je réalise que je ne peux pas devenir un être humain à part entière, ni un parent capable d'un amour inconditionnel si je n'abandonne pas les fantômes de ma propre enfance. Et c'est que je demande à nous tous de faire ce soir. Soyons à la hauteur du cinquième des Dix Commandements. Honorez vos parents en ne les jugeant pas. Donnez-leur le bénéfice du doute. C'est pourquoi je veux pardonner mon père et cesser de le juger. Je veux pardonner à mon père parce que je désire un père et que c'est le seul que j'ai. Je veux que le poids de mon passé disparaisse de mes épaules, je veux me libérer pour entrer dans une nouvelle relation avec lui et pour le reste de ma vie, me débarrasser des fantômes du passé. Dans un monde rempli de haine, nous nous devons de toujours espérer. Dans un monde rempli de colère, nous nous devons de toujours réconforter.
Dans un monde rempli de désespoir, nous nous devons de toujours rêver. Et dans un monde rempli de méfiance, nous nous devons de toujours croire. À vous tous ce soir qui êtes déçus de vos parents, je demande que vous laissiez tomber votre déception. À vous tous ce soir qui se sentez trompés par vos pères ou mères, je demande que vous ne trichiez pas davantage vous-même. Et à vous tous ce soir qui souhaitez repousser vos parents, je demande que vous tendiez plutôt la main vers eux. Je vous demande, ainsi qu'à moi-même, que nous donnions à nos parents le cadeau de l'amour inconditionnel de sorte qu'ils puissent eux aussi apprendre de leurs enfants comment aimer. Ainsi, l'amour sera finalement rétabli dans le monde désolé et vide. Shmuley m'a dit une fois qu'une ancienne prophétie biblique soutient qu'un nouveau monde et un nouveau temps viendraient quand "le coeur des parents sera restauré par le coeur de leurs enfants". Mes amis, nous sommes ce monde, nous sommes ces enfants.
Mahatma Gandhi disait : "Le faible ne peut jamais pardonner. Le pardon est l'attribut du fort." Ce soir soyons fort. Au-delà d'être fort, relevons le plus grand défi de tous, celui de reconstruire cet engagement brisé.
Nous devons tous vaincre malgré les séquelles de l'enfance laissées sur nos vies et dans les mots de Jesse Jackson, se pardonner, se racheter et se remettre en route. Cet appel au pardon ne peut pas avoir comme conséquence des moments à la 'Oprah', avec des milliers d'enfants se réconciliant avec leurs parents partout dans le monde, mais ce sera au moins un début, et nous serons tous tellement plus heureux par la suite. Ainsi mesdames et messieurs, je conclus ce soir mes observations avec foi, joie et excitation.
À partir d'aujourd'hui, qu'un nouveau chant se fasse désormais entendre. Laissons ce nouveau chant être le son d'enfants qui rient. Laissons ce nouveau chant être le son d'enfants qui jouent. Laissons ce nouveau chant être le son d'enfants qui chantent. Et laissons ce nouveau chant être le son de parents qui écoutent. Ensemble créons une symphonie des coeurs s'émerveillant au miracle de nos enfants et se réjouissant dans la beauté de l'amour. Guérissons le monde et détruisons sa douleur. Et nous pourrons faire ensemble une merveilleuse musique.
Que Dieu vous bénisse, je vous aime. " |
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